L’humanité ne tient qu’à un fil…accroché à la main de Dieu
Je suis en Espagne, dans notre communauté à Urda, au Sanctuaire du Christ, l’un des haut lieu spirituel de pelerinage, situé dans la région de Castilla la Mancha, province de Toledo.
Quelques mois après mon arrivée dans ce lieu, ce fut le début de la pandémie, une crise qui allait toucher la planète entière. Je ne vous apprends rien, en disant que cette crise inédite, sans précédent, a affecté l’humanité toute entière et à tous les niveaux: économique, social, politique et même spirituelle, entrainant avec elle un lot de malheurs. Lorsqu’on traverse une crise, soit on sort grandi, soit on sort pire qu’avant, diminué “ A la fin de cette pandémie que nous espérons pour bientôt, sortirons-nous grandi, diminué ? Quelles prises de conscience ?
Je dois avouer que face à l’ampleur de l’épidémie, j’en suis arrivée à me demander: « mon Dieu, pourquoi tout ce malheur, pourquoi cette pandémie, pourquoi personne n’a rien vu venir, pourquoi pourquoi…? Et j’imagine que bon nombres de personnes se sont posées les mêmes questions.Ma pensée va surtout vers les familles qui ont perdu un ou plusieurs êtres chers, c’est douloureux, ceux qui ont perdu leur emploi et sont désormais au chômage, vivent dans la précarité, ne sachant pas ce que sera le lendemain.
Pour faire face à l’épidémie, plusieurs mesures barrières ont été mises en place, entre autres, la distance de sécurité et la distanciation sociale. Cependant, il me semble important de faire la différence entre les deux termes, qui mal compris, peuvent être source de confusión et engendrer plus de mal que de bien.
Distanciation sociale ou distance de sécurité ?
Durant le confinement, il était imposé une distanciation sociale en vue de freiner la propagation du virus. Chacun était invité à rester chez soi, ne sortir que pour les urgences et en cas d’extrême nécessité. Et selon les scientifiques, cette mesure a cassé plusieurs chaînes de contamination. Ensuite, après le confinement, lorsqu’on a pu de nouveau se retrouver, que ce soit dans les lieux de culte, ou dans les lieux publics, il s’agissait désormais, non plus de distanciation sociale, mais de distance de sécurité. Beaucoup ont eu et ont encore du mal à faire cette différence , en restant chez eux, terrorisés par la peur de rencontrer l’autre, d’être de nouveau en contact avec ses pairs, voir de fréquenter les lieux publics, tant ils considèrent l’autre comme un danger, un potentiel porteur de virus, dont il faut fuir comme le feu. Bien sûr, les mesures barrières restent en vigueur, le port du masque obligatoire, lavage fréquent des mains, tousser dans le coude, ceci nous fait comprendre que chacun est responsable non seulement de sa santé, son mode de vie, mais aussi de la santé de l’autre, dans la mesure où non seulement il faut se protéger, mais protéger aussi l’autre en adoptant des gestes barrières, et en respectant les distances de sécurité pour le bien de tous.
La rencontre qui aide à devenir plus humain,
D’une part, on a senti combien sont importantes les relations humaines. Être loin des siens, privés d’aller les voir, ne fut ce qu’une visite de courtoisie, rester enfermé chez soi sans pouvoir sortir ni aller où on aimerait aller, a fait redécouvrir pour bon nombre le sens de la fraternité, la valeur et la place de l’autre dans notre vie. Nous sommes des êtres sociables, faits pour vivre en société. L’homme a besoin des autres pour se connaître, construire sa vie, acquérir son identité.
La Maggie des petites choses !
D’autre part, cette crise a provoqué une vague de solidarité, un retour à Dieu, a invité chacun et chacune à se poser, pour réfléchir et finalement redécouvrir que l’essentiel n’est pas dans les courses effrénées vers le bonheur, mais c’est de savoir s’arrêter pour goûter aux petites choses de la vie, savourer le bonheur qui se trouve à notre portée dans notre vie quotidienne, une fleur, le sourire d’un enfant, un travail bien fait…il s’agit en effet de redécouvrir “la maggie des petites choses”
Construire ensemble un monde meilleur
Pendant le confinement, une consoeur m’écrivait ; “Nous sommes confinées dans le coeur de Jésus, sans masques”Belle expresión n’est ce pas ? N’est ce pas là le lieu sûr, où durant cette période de crise , et non seulement en période de crise, mais durant notre vie, nous sommes invités à nous confiner dans ce Coeur qui aime tant l’humanité et s’est livrée pour elle…pour y puiser les forces, l’amour nécessaire comme moteur de notre vie ?
Dans notre adoration eucharistique quotidienne, au coeur de nos vies, nous portons à Jésus cette humanité fragile, qui souffre et dont le seul refuge c’est auprès de Jésus, car finalement, l’humanité, notre vie, ne tient qu’à un fil, et ce fil est tenu par la main de Dieu.
Enfin, qu’on le veuille ou non, la vie ne sera plus comme avant, comment será-t- elle ? Il revient à chacun d’inventer, de construire jour après jour un monde plus fraternel, plus sociable, plein d’humanité, à la mesure du manque qu’il aurait éprouvé durant cette crise de la pandémie. Et ce n’est qu’ensemble que nous pouvons construire ce monde meilleur dont nous rêvons tous. Travail de longue haleine n’est ce pas ?
Il ne fait que commencer !
Soeur Mauricette, SCJ